Dessiner pour me sentir vivante – Manifeste pour un croquis libre et habité
- Daily Kat
- il y a 6 jours
- 3 min de lecture
Il y a quelque chose de singulier dans le fait de dessiner en direct. Quelque chose d’à la fois fragile et vibrant.
Pour ce centième article, j’avais envie d’écrire autrement. Sans plan, sans promesse, juste en me laissant guider par ce qui me fait tenir le crayon.
Ce n’est pas seulement une technique ou une prestation artistique. Pour moi, c’est une manière d’être au monde. Une façon de rencontrer l’autre, crayon à la main, les yeux bien ouverts et l’attention en éveil.
Je sais que dessiner devant les autres, en public, peut être inconfortable pour beaucoup d’artistes. Mais c’est dans ce moment un peu fragile que, moi, je me sens à ma place. Je m’y sens vivante.
Quand je dessine en live, je ne cherche pas à montrer ce que je sais faire. Je cherche à transmettre quelque chose. Une sensation. Une présence. Ce que j’aime, c’est voir les gens se poser, se détendre, s’ouvrir. Il y a souvent un sourire, une hésitation, un éclat de rire… Et c’est ce moment que je capte, que je mémorise, avant même de tracer la moindre ligne. C’est ce qui me guide. Je ne dessine pas juste un visage, je dessine une rencontre.
Et cette rencontre passe aussi par mon trait, qui surprend souvent les personnes que je croque. Je suis très lente, très minutieuse quand je m’attarde sur le visage — parce que c’est là que se joue la ressemblance, l’émotion. Mais ensuite, quand je pose les épaules, les vêtements, les jambes, mon geste s’accélère. Les lignes deviennent vives, dynamiques, presque instinctives.
Et je sens que ça les surprend : ce contraste entre la précision initiale et l’élan du reste. Comme si le dessin prenait vie sous leurs yeux.

J’ai toujours aimé cette tension-là : entre le temps suspendu et le mouvement rapide. Je crois que mon style s’est construit autour de ça. Du visible et du suggéré. Du présent et de l’inachevé. J’ai besoin de laisser respirer le dessin, de ne pas tout dire, de laisser des zones ouvertes. Il y a toujours une part que j’abandonne à l’imaginaire.
Et puis… j’avoue : moi, les dessins qui durent des heures, ça m’épuise. Dès que je commence, j’aimerais déjà avoir fini. C’est peut-être étrange, mais j’aime quand ça va vite, quand ça fuse. C’est aussi pour ça que le croquis live m’attire autant. Ce n’est pas de la précipitation, c’est une intensité.
C’est une pratique exigeante, bien sûr. Elle demande d’observer, de choisir, de styliser, de synthétiser… Il faut travailler sa mémoire visuelle, s’adapter à chaque situation, improviser, accueillir l’imprévu. Le brief du client n’est jamais le même, les conditions non plus. Mais ce que j’apprécie profondément, c’est que ça nous pousse à évoluer, sans jamais nous dessaisir de notre signature artistique.
Je continue d’explorer, de me former, de chercher. Parce que, oui, cela demande autant de réflexion et de rigueur qu’une œuvre d’atelier. Et parce que, dans ce métier, on n’a jamais fini d’apprendre.
Alors voilà. Je dessine en live parce que c’est là que je me sens la plus vivante. Parce que c’est une pratique qui m’invite à chaque fois à être entière, attentive, réactive, généreuse. Une pratique dans laquelle on se donne — et on reçoit beaucoup aussi.

Dailykatement vôtre,
Illustratrice
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